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La junte guinéenne confrontée aux syndicats

26 février 2024

C'est d'abord pour dire "stop" à la flambée des prix et à la censure que les 13 centrales syndicales de Guinée ont appelé à la grève générale et illimitée, à laquelle se sont associés de nombreux secteurs de l'économie.

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Une rue vide de Labé (26.0.24)
Les rues de Guinée étaient déserte aujourd'hui, comme ici, à LabéImage : Mamadou Oury Barry

Cette grève générale et illimitée qui a débuté ce lundi [269.02.24] en Guinée est une première pour la junte militaire qui a pris le pouvoir en 2021.

Les militaires ne s'étaient encore jamais confrontés à un mouvement de protestation de cette ampleur, depuis le coup d'Etat du 5 septembre 2021.

Et pourtant, aucun rassemblement n'était prévu à Conakry, ni aucune manifestation. Celles-ci sont interdites.

Les centrales syndicales ont tout bonnement demandé aux travailleurs de rester à la maison. Des formations politiques comme les Forces vives de Guinée, ont enjoint leurs militants à suivre le mouvement.

Plusieurs sources nous ont confirmé que sur l'ensemble du territoire, la plupart des assurances, des banques, ou des instituts de microfinances, par exemple, sont restés fermés. Tout comme les écoles.

Interview Michel Pepe Balamou (syndicat SNE Guinée)

La ville de Labé à l'arrêt

A Labé, le marché central et ses alentours étaient fermés aussi. Les marchands sont restés assis devant leur porte. Quant au transport interurbain, il était totalement à l'arrêt.

En revanche, des témoins nous ont signalé "des attroupements sur certains axes" et que certains transporteurs tentaient d'"occuper les rues". Les bureaux de l'administration publique ont ouvert partiellement.

Plusieurs revendications

L'une des premières revendications des grévistes est la libération immédiate et sans condition du journaliste et syndicaliste Sékou Jamal Pendessa. secrétaire général du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG).

Sekou Jamal Pendessa a été condamné à six mois de prison ferme il y a quelques jours pour avoir appelé à manifester en janvier. Sa mise en détention a fait éclater la colère des Guinéens.

Des médiateurs religieux ont affirmé aux syndicalistes, à la mi-journée, que le gouvernement aurait promis sa libération sous 72 heures.

Toutefois, Michel Pépé Balamou, secrétaire général du Syndicat national de l'éducation (SNE) et membre de la Coalition nationale de négociations pour la partie syndicale, rappelle que le "ras-le-bol" dépasse ce cas particulier : 

"Au-delà des organisations syndicales, vous observerez sur le terrain un mécontentement généralisé de tous les travailleurs, de toute la population guinéenne par rapport à la paupérisation dans laquelle elle se trouve, mais aussi la cherté de la vie, l'augmentation du prix des denrées de première nécessité, sans consultation préalable avec les syndicats."

Rue déserte à Labé (26.02.24)
Les boutiques sont restées closes à Labé comme dans le reste de la GuinéeImage : Mamadou Oury Barry

Des engagements non-tenus

Les organisations syndicales reprochent aux autorités de ne pas avoir cherché à les recevoir durant toute la durée, pourtant prolongée, du préavis de grève. Le gouvernement n'aurait pas appliqué les accords tripartites passés fin 2023.

Les syndicats réclament aussi la levée des restrictions qui pèsent sur les radios et les télévisions privées, ainsi que le rétablissement d'un accès à internet sans limitation.

Les leaders syndicaux se disent déterminés à maintenir la grève au-delà de 72 heures et à bloquer le pays autant de temps qu'il le faudra pour que le gouvernement accède à leurs revendications.

L'ombre de la répression de 2007

Certains brandissent le souvenir des grandes grèves de 2007, sous Lansana Conté, qui avaient requis l'intervention de la Cédéao et la  nomination de Lansana Kouyaté à la tête du gouvernement pour dénouer la crise.

A l'époque, en à peine plus d'un mois, la répression avait fait 137 morts et plus de 1.600 blessés, selon le ministère de l'Intérieur.

Le site Guinée Matin annonce la mort d'un élève de 18 ans, tué ce matin en banlieue de Conakry. Le jeune Mamady Keita a été tué par balle, dans la zone de Sonfonia, près de l'université Barack Obama. 

Une autre personne a été tuée aujourd'hui en Guinée: un conducteur de taxi-moto âgé de 21 ans, Ibrahima Touré, résidant dans le quartier de Hamdallaye Pharmacie à Conakry.