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Des morts au Tchad après la victoire de Mahamat Idriss Deby

Blaise Dariustone
10 mai 2024

Ces morts font suite à des tirs de célébration de militaires. L’opposition et la société civile se disent choquées et doutent des résultats du scrutin.

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Mahamat Idriss Deby Itno au cours d'un meeting de campagne (25.04.2024)
Mahamat Idriss Deby Itno a déclaré que sa victoire est celle de tous les Tchadiens Image : Gilles Chris Namia Rimbarne/REUTERS

Après la proclamation des résultats jeudi (09.05.2024), N’Djamena, la capitale tchadienne, a été secouée par des détonations et crépitements d’armes lourdes et légères jusqu’au petit matin. Des tirs effectués par des militaires, mais aussi des civils, partisans du vainqueur annoncé de cette élection, Mahamat Idriss Deby Itno.

Au moins une dizaine de personnes atteintes par balles ont succombé à leurs blessures et une soixantaine ont été admises dans les hôpitaux de N'Djamena et dans les provinces. C’est le cas d’Alliance Djekouayom, blessée chez elle, au quartier Gassi, dans le septième arrondissement de N'Djamena.

Condamnations

"Hier, on était dehors en train de suivre les résultats de la présidentielle et soudain, j'ai pris une balle au niveau de la fesse. Je suis allée à l'hôpital et on m'a fait une radiographie. Ils ont dit que la balle était ressortie, mais il y a eu des blessures. Je me sens très mal, la douleur persiste", raconte Alliance Djekouayom à la DW. 

Ecoutez le sujet de Blaise Dariustone, le correspondant à N'Djamena

Le jeune Neldjibaye Madjissem a été aussi victime d’une balle perdue. Il a été atteint alors qu'il était couché dans sa cour.

"Aux environs de 22 heures, j'étais couché tranquillement à la maison et j'ai reçu un coup au niveau du bras. Lorsque je me suis réveillé, je me suis rendu compte que j’étais en train de saigner. J’ai regardé et j’ai compris que j'avais été touché par une balle, que j'ai ramassée. Ce n’était pas facile de sortir de chez moi, comme ça tirait de partout. C'est aux environs de 1h que j'ai pu aller à l'hôpital. Ils m'ont examiné et ils ont dit que ce n'est pas grave. Le personnel de l'hôpital était débordé hier soir. Il y avait des cas graves que j'ai vus au niveau de l'hôpital général de référence nationale."

Une situation que dénonce la société civile tchadienne. Pour Sosthène Mbernodji, le coordonnateur du Mouvement citoyen pour la préservation des libertés, l'Etat doit identifier les responsables de ces tirs et dédommager les victimes.  

‘’ Je condamne cette manière de faire. Dans le commandement militaire, il y a un chef et donc il faut établir les responsabilités. Des victimes doivent aussi être dédommagées. Nous ne sommes pas dans un Etat normal, nous sommes dans un no-man's land où on peut tuer comme on veut. C’est un terrorisme d’Etat qui s’est installé hier et aujourd’hui. C’est la France de Macron qui a laissé faire, qui soutient ce régime, donc elle porte la responsabilité de toutes les victimes au Tchad’’.

Dissuasions de velléités de contestations

L’usage des armes après la proclamation des résultats viserait à dissuader les Tchadiens de contester les résultats, indique Max Kemkoye, le porte-parole du Groupe de concertation des acteurs politiques, qui avait appelé au boycott du scrutin. 

 ‘’C’est tout simplement une technique de dissuasion qui est pensée parce qu’ils savaient que pendant et après la proclamation des résultats, les gens allaient réagir. Les résultats rendus publics dans une célérité qui défie toutes les logiques en la matière ne peuvent pas exprimer le vote des Tchadiens. Comment imaginer que du 7 au 8, c’est-à-dire en 48 heures, plus de 20.000 procès-verbaux soient transportés de 22 provinces et que dans les mêmes 48 heures, ces plus de 20.000 procès-verbaux soient traités manuellement par des hommes qui ne sont pas des robots. C’est inimaginable’’.

Une rue à Moundou dans le sud du pays (mars 2021)
Le scrutin présidentiel avait déjà émaillé par un mort dans la ville de Moundou, dans le sudImage : Blaise Dariustone/DW

Nous avons cherché à obtenir la réaction des autorités tchadiennes chargées de la sécurité, mais celles-ci n’ont pas souhaité réagir pour l’instant.